Le chant d'une île
À l’échelle planétaire, la pêche industrielle épuise les océans. Rabo de Peixe, petit village des Açores où la pêche artisanale a longtemps constitué la principale activité économique, est en difficulté. Pedro, jeune patron de pêche, doit faire face aux périls inhérents à la vie des travailleurs de la mer. Pendant deux années entières, ce film raconte sa détermination et celle de son équipage à rester libres.
Critiques
Dans la droite lignée de la pensée d’André Bazin, ou, plus près de nous, des travaux documentaires de Wang Bing, Joaquim Pinto utilise le cinéma à dessein, afin de capter sur pellicule une présence physique, une preuve de leur existence concrète et, si j’ose dire, spirituelle. Geste politique et contestataire dans le sens où Pinto met en scène les opprimés de la société, en tout cas ceux qui sont voués à s’éteindre sous l’influence d’intérêts économiques pernicieux. La caméra devient le réceptacle de faits et gestes qui risquent, un jour ou l’autre, de se dissoudre à jamais dans l’air du temps. En 2015, cette collectivité a malheureusement cessé d’être, remplacée par une multinationale qui a monopolisé les lieux. Que sont-ils devenus exactement ? Nous l’ignorons ! Cependant, nous disposons d’une trace de leur existence, grâce à ce documentaire. C’est toute la portée morale (encore une fois…) de ce film précieux. www.critique-film.fr
Il y a quelque chose de Gauguin en Polynésie dans la façon qu’ont les auteurs de nous faire ressentir le soulagement existentiel que ce lieu et ses habitants leur inspirent. Un eden dont ils filment avec émerveillement les coutumes, la musique, les processions, consacrant une large part du film à l’étude anthropologique – sans pour autant créer une désagréable distance d’ethnographe. Pinto et Leonel ne s’abîment pas non plus dans un exotisme de carte postale, et n’ont pas à en rajouter pour que résonne d’elle-même une vibration très fantasmatique au cœur du film, une résurgence mythique de la vie sauvage et des récits de marin, sur cette île arrachée à l’immensité atlantique qui aurait très bien pu être un port d’attache des baleiniers de Moby Dick. www.lesinrocks.com